Éditorial
Février 2002


Par Laurent Girard
Février 2002

Depuis de longuesannées, le Carré des Halles, bistrot lillois, est devenu une véritable institution.
Les concerts s'y succèdent au rythme d'un par semaine, le jeudi soir, et il a appris à révéler les nouveaux talents de la scène rock lilloise. C'est un passage incontournable pour tout nouveau groupe qui prétend avoir un avenir. En effet, le calendrier est plein un an à l'avance, ce qui place la longévité minimum d'un groupe à une année, mais souvent plus, car nombreux sont ceux qui menèrent ou mènent encore une carrière "nationale" après avoir fait leurs premières armes au fond de cette petite salle enfumée sous les yeux d'un public fidèle juché sur les tables de bois massif.
Mais le Carré est aussi un lieux de grande convivialité qui a su garder sa personnalité à deux-cents mètres de "la rue de la soif", disneyland de la biture municipale canalisée.

C'est ou c'était...
Tout d'abord, cela fait une paire d'année que je n'ai pas remis les pieds à Lille. Et puis je me sens pris de nostalgie quand je lis ce matin dans Libération (28 février) que, suite à un contrôle de l'Ursaaf mettant en cause le défraiement des artistes, le Carré devait cesser sa programmation musicale.

En dehors de l'aspect purement administratif et légal, on peut se poser la question de l'avenir de la culture dans ce pays. Nous restera-t-il bientôt un autre choix que ces quelques chanteurs de variétés formatés, passant en boucle sur toutes les ondes ? Restera-t-il pour l'amateur de pratique musicale autre chose que les tramplins de la Star Academy pour être entendu ?
Car ces petites salles, ces bistrots sont le seul moyen pour un petit groupe de se faire connaître, de confronter son style à un public. Obliger les cafés-concerts à se plier aux règles de salles plus grandes ne peut que les contraindre à la fermeture.
Si les musiciens ne sont parfois que défrayés, les patrons de bars ne tirent pas toujours grand profit des concerts. La plupart n'agissent que par goût pour la musique. Cependant, ces lieux jouent un rôle essentiel dans la vie culturelle de notre pays, ils sont les laboratoires permettant à de nouveaux talents d'émerger, ils sont aussi des lieux de convivialité indispensables à cette cohésion sociale tant invoquée par ceux qui prétendent prendre en main notre avenir.

Alors, Lille ville capitale européenne de la culture en 2004, sans cafés-concerts ?

Pour de plus amples informations et pour soutenir les musiciens lillois : www.lateteaucarre.org/.