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Document
transcrit et traduit
par
UJHELYI Sarolta
correspondante dEsteurop
à Budapest.
Mai 1996 |
  

a célèbre chanteuse hongroise Sebestyén Márta (1) est actuellement à la une de lactualité en Hongrie. Spécialiste de la musique folklorique hongroise et du sud-est de lEurope en général, depuis vingt ans, douée dune voix à la clarté et à lexpression inouïes, elle défraye maintenant la chronique dans un domaine tout à fait différent, et ce, presque à son insu. En effet, le duo français Deep Forest a utilisé sa voix exceptionnelle dans lune de ses chansons. Depuis, lalbum est devenu disque dor aux États-Unis, en Angleterre, en Australie, en France et a fait la célébrité de la chanteuse. Aujourdhui, les disques de « Muzsikás » (le groupe folklorique hongrois qui accompagne Márta) se vendent également aux quatre coins du monde. Voici quelques propos accordés par Sebestyén Márta, lors dune entrevue à la télévision hongroise.
Question : Quand a débuté ta carrière internationale ?
Sebestyén Márta : Jai voyagé avec le groupe Muzsikás dès le début des années 80. Mon premier voyage avec eux fut une tournée en Australie et en Nouvelle-Zélande. Ensuite les voyages, les festivals se sont multipliés. Depuis 1984, un éditeur anglo-américain a racheté les droits de mes disques à Hungaroton (2), et cest lui qui les propage dans le monde.
Q. : Depuis, tu es devenue millionnaire ?
S.M. : Je ne sais pas pourquoi tu dis ça. On ne touche rien sur ces disques. Je continue à vivre à Budapest, comme nimporte qui, avec ma mère et mes enfants. Sur les nouveaux disques pour lesquels nous dictons nous-mêmes les conditions du contrat, on touchera peut-être quel-que chose. Mais ce nest pas largent qui compte. Il est difficile dêtre millionnaire en chantant ce genre de musique.
Q. : Comment a commencé laventure avec Deep Forest ?
S.M. : Ça date de lannée dernière. Jai reçu un coup de fil de Bruxelles, me demandant ce que je dirais si je recevais une cassette avec une chanson dans laquelle ma voix, récupérée sur une ancienne chanson folklorique, serait utilisée dans un remixage façon « rock ». Jétais stupéfaite que ladaptation soit déjà réalisée, sans que jen sois au courant. Puis, jai reçu la cassette ; cétait un morceau de Deep Forest. Je lai écouté plusieurs fois, assez étonnée. Ma manière découter est un peu spéciale; jai reçu dès lâge de six ans, une formation de musique folklorique et ma façon découter est très différente de ceux qui ont été élevés au milieu des « stars du rock ». Finalement jai trouvé que la cassette était belle. Enfin, ce qui compte, cest lintelligence et le goût de lindividu qui perçoit ce genre de musique. Sil la perçoit comme faisant partie de la culture hongroise, et quainsi la musique folklorique hongroise puisse faire le tour du monde, alors jen serais fière et heureuse. Jai donc rappelé Bruxelles et donné mon accord.
Q. : Il paraît que tu as dû partir pour Lille ?
M.S. : Peu de temps après, jai reçu un fax qui me demandait de partir pour Lille le lendemain matin, pour enregistrer. Dans leur studio, je pouvais chanter mes chansons, tout ce que je voulais, dans nimporte quelle langue. Ils ont finalement choisi une mélodie bulgare. On a travaillé dans une atmosphère cool et sympa. Imagine-toi ! Un feeling à la française
bouffe jusquà une heure du matin
Cétait génial !
Q. : À ton avis, pourquoi la musique ethno est-elle si à la mode en ce moment ?
S.M. : Je pense que cette curiosité répond à une grande exigence. On se rend compte, petit à petit, au moment où le monde est déjà « en plastique », que loriginal, cest le coton, la laine et les choses « bio ». Aujourdhui tout est en bio. Les paysans dautrefois vivaient dans un entourage bio, mais alors, on les trouvait très pauvres. En ce moment nous manque donc cette pauvreté qui est loriginal. Je crois que cest la même chose à propos de la musique ethno. Cest une vraie voix qui nétant pas artificielle, se différencie des autres. Cest une nécessité de lâme. Selon moi, cest lessence de la musique folklorique partout dans le monde.
Document transcrit et traduit par
UJHELYI Sarolta
correspondante dEsteurop à Budapest.
Notes
1. En hongrois, on indique le nom avant le prénom.
2. Avant 1989, Hungaroton était la firme de disques de lÉtat hongrois.


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